Intervention d’Alexis Blondeau au Conseil municipal de Clermont-Ferrand le 5 Mars 2021.
“Comme ça, tu ne recommenceras pas” ! Ce sont les mots prononcés par un jeune médecin (un monstre assurément) à une jeune femme de 19 ans, après lui avoir fait un curetage à vif suite à une interruption de grossesse en 1946.
Cet acte de torture, cette sanction à la liberté de femme est l’un des événements fondateurs des nombreuses luttes de Gisèle Halimi qui nous a quitté le 28 juillet 2020, unique avocate signataire du manifeste des 343 en 1971 réunissant des femmes qui déclarent avoir déjà avorté et qui réclament le libre accès à l’avortement.
A 13 ans, Gisèle Halimi entame une grève de la faim pour ne plus avoir à faire le lit de son frère. Une fois que ses parents aient cédé, elle écrit dans son journal intime “aujourd’hui, j’ai gagné mon premier petit coup de liberté”. Ces “bouts de liberté” ont été le combat de sa vie.
Gisèle Halimi créé avec Simone de Beauvoir, avec l’académicien Jean Rostand, avec la romancière Christiane Rochefort, avec le prix Nobel de médecine Jacques Monod le mouvement “choisir la cause des femmes”.
Les objectifs sont nos 3 ordres :
- l’éducation sexuelle et la contraception
- l’abrogation de la loi de 1901 qui interdisait la contraception et l’avortement
- la défense gratuite des femmes poursuivies pour avortement
Lors du procès de Marie-Claire Chevallier en 1972, mineure accusée d’avoir eu recours à un avortement après un viol, Gisèle Halimi, chargée de sa défense va médiatiser avec Simone de Beauvoir, cette cause au niveau national.
Des colonnes de l’humanité aux unes du Figaro, des voies diverses défendent à l’époque Marie-Claire, l’opinion publique va basculer, grâce à cette affaire sur la question du droit à disposer de son corps.
Marie-Claire est relaxée, le tribunal correctionnel a considéré qu’elle a souffert de contraintes d’ordre moral, social, familial auxquelles elle n’avait pas pu résister.
Ce n’est qu’un début et la loi sur l’IVG (Interruption Volontaire de Grossesse) portée par Simone Veil sera promulguée 3 ans plus tard.
Pour l’infatigable avocate, le combat continue… Élue députée de l’Isère en 1981, elle poursuit le combat à l’Assemblée nationale cette fois-ci pour le remboursement de l’IVG, voté en 1982.
Elle agira également en faveur de la parité en politique avec son amendement qui obligeait aux listes de candidats lors des élections municipales à ne pas comporter plus de 75 % de personnes du même sexe.
Gisèle Halimi a été une militante de tous les droits. Elle est également une figure du mouvement LGBT+ au temps où personne ne souhaitait porter à l’Assemblée nationale la promesse de François Mitterrand qui était d’abroger la distinction à la majorité sexuelle pour les rapports homosexuels (qui était de 18 ans, contre 15 ans pour les rapports hétérosexuels).
Gisèle Halimi devient la rapporteuse sur la dépénalisation de l’homosexualité avec Robert Badinter, mais aussi avec Gaston Defferre, Jack Lang et Roger Quilliot, chacun œuvrant dans ce sens dans leur ministère.
Aux côtés des héros de l’Histoire de France, Gisèle Halimi a toute sa place.
Dès que les conditions sanitaires le permettront, un hommage national lui sera rendu, au printemps nous l’espérons.
Le processus de panthéonisation de Gisèle Halimi a été lancé par le Président de la République en janvier. Notre groupe s’associe au vœu présenté par nos collègues.
Il y a encore beaucoup de “bouts de liberté” à défendre et à gagner, ne nous résignons jamais.