Question orale d’Eric Faidy à Monsieur le Maire au Conseil municipal de Clermont-Ferrand du 25 septembre 2020.
Vous avez récemment déclaré dans la presse locale que vous souhaitiez embaucher une dizaine de policiers municipaux, soulignant que la situation à Clermont-Ferrand se dégradait en matière de tranquillité publique. Nous saluons cette position car en effet, les incivilités, les agressions, les tapages nocturnes sont malheureusement le quotidien de beaucoup de clermontoises et de clermontois. Nous souhaitons vous remercier de cette prise de conscience ou de cette affirmation qui, nous l’espérons, se traduira en action.
Je voudrais décrire la situation actuelle. Aujourd’hui, à Clermont-Ferrand, il y a 50 policiers municipaux, soit deux fois moins qu’à Grenoble et moins qu’à Rennes par exemple. Cela ne veut pas dire en plus que 50 policiers sont sur le terrain chaque jour, mais seulement deux patrouilles en voiture, deux patrouilles à pied et une équipe de VTT le matin ou le soir, soit une quinzaine seulement. Depuis 2018, il n’y a pas de directeur de la police municipale à Clermont-Ferrand.
Nos questions sont donc :
- Prévoyez-vous d’embaucher un directeur de la police municipale à Clermont-Ferrand ?
- Pourquoi refusez-vous de doubler l’effectif de la police municipale ? Ceci nous mettrait ainsi au niveau de Grenoble, Rennes et dans la moyenne des métropoles de France.
Réponse d’Olivier BIanchi :
Je voudrais d’abord rappeler qu’il y a quelques mois maintenant, le secrétaire d’Etat (de l’époque) à la sécurité était venu pour dire qu’ils allaient aider Clermont-Ferrand.
Il m’avait d’ailleurs dit à cette occasion qu’il me recevrait. Il n’a pas eu le temps de me proposer un rendez-vous car il n’est plus place Beauvau.
J’ai donc pris ma plume et demandé un rendez-vous au ministre Darmanin qui ne m’a toujours pas répondu. Mais je suis patient, j’ai compris que pour l’instant il recevait dans l’ordre alphabétique toutes les villes de France. Je sais qu’il a vu monsieur Piolle (Maire de Bordeaux), ça sera bientôt le tour de Clermont-Ferrand je n’en doute pas, et j’aurai l’occasion d’exprimer avec lui les demandes et les revendications en matière de sécurité de la ville de Clermont-Ferrand.
A ma première élection en tant que Maire de Clermont-Ferrand en 2014, le nombre de policiers municipaux n’était pas très élevé…
La politique de la ville de l’époque n’était pas une politique de tranquillité publique extrêmement précise. C’est pourquoi nous avons mis en place différentes mesures :
- un Conseil des droits et des devoirs des familles
- la rénovation totale de notre CLSPD qui datait de trop longtemps. Nous avons souhaité d’ailleurs l’élargir à l’ensemble de la métropole et pas simplement aux communes qui sont membres de la “zone police” de notre territoire.
- l’augmentation du nombre de TIG (Travaux d’Intérêt Général) accueillis en lien avec la justice
- un dispositif de prévention situationnelle lors des travaux et des projets urbains dans des commissions mixtes avec les forces de l’ordre. Nous avons même renforcé nos coopérabilités elles car lorsque je suis arrivé par exemple, nos talkie-walkies et nos téléphones n’étaient pas sur les mêmes fréquences et les mêmes ondes…
- le jeu “Les experts de la citoyenneté”, unique en France afin de sensibiliser l’ensemble des élèves aux règles du vivre-ensemble et de détecter des situations problématiques. Nos policiers vont faire de la sensibilisation dans les écoles, et travaillent évidemment à l’éducation du vivre ensemble.
Nous avons rénové la doctrine d’emploi et d’usage de nos policiers municipaux après de très longues réunions, des discussions aussi dans le cadre des CT (Conditions de Travail ?) des CHSCT avec les représentants et les organisations syndicales de ces salariés.
Nous avons équipé plus fortement ces policiers municipaux avec des véhicules neufs, des tonfa, des bombes au poivre maximum catégorie, nous leur avons confié à chacun des gilets pare-balles avec le meilleur modèle à leur demande : celui qui empêche les balles de kalachnikov de pénétrer.
Nous avons également multiplié le travail de coopération avec l’ensemble des services de l’État : police, préfecture, DDSP (Direction Départementale de la Sécurité Publique)… Ils nous ont permis, après un certain nombre d’actions fortes, de sécuriser l’un des points noirs qui était le marché Saint-Pierre, Ceci n’a d’ailleurs pas empêché le déplacement du trafic de drogue vers la gare et dans d’autres endroits… mais je lisais il y a peu de temps une intervention de Monsieur Darmanin (ministre de l’intérieur) qui évoquait au fond les problèmes de la lutte contre les stupéfiants à l’échelle mondiale, et aussi à l’échelle de nos villes. Finalement, nous avons un problème puisque cela ne suffit pas d’arrêter quelques personnes dans un système de trafic… Ils se réinstallent très vite et parfois même dans la ville, ce que nous avons vécu.
Je pourrais encore être avec vous un peu pervers en prenant la parole trop longtemps et en énumérant :
- les 10 policiers supplémentaires et les 14 agents de surveillance de la voie publique qui ont été créés
- les 6 agents de la “brigade incivilités’ et les mesures que nous avons prises pour mettre des arrêtés qui sanctionnent un certain nombre de comportements
- le changement du mobilier urbain dans certains endroits
- les “caméras piétons” dont nous avons équipé nos personnels
- les VTT et les mobylettes électriques qui n’existaient pas
- les caméras qui sont passées de 0 à plus de 150 avec un budget de 1 354 000 €…
enfin en réalité, nous avons travaillé sur tous les axes de la rénovation de la politique de tranquillité publique sur le territoire.
Il y a encore :
- la coopération avec les services afférents
- la question des effectifs que nous avons montés
- le certain nombre de matériels que nous avons mobilisés et les reprises de doctrine, tout en continuant à privilégier parce que c’est notre ADN, l’éducation, l’animation, le vivre-ensemble, la médiation et les accompagnements.
Nous avons aidé les bailleurs sociaux à mettre des médiateurs dans les immeubles (ce qui a plutôt bien fonctionné), nous avons rétabli des services publics dans un certain nombre de quartiers où il y avait des difficultés (je pense à la Maison du Droit sur le boulevard menant à Saint-Jacques), nous avons développé la présence au château des Vergnes d’une véritable mairie décentralisée avec des services pour les habitants… Notre réponse est plurielle et diversifiée.
La réalité simplement c’est que les actes et le ressenti continuent à augmenter sur notre territoire.
La question qu’il faut poser Monsieur Faidy, et c’est la question que je poserai au ministre de l’intérieur : “A chaque fois que les collectivités vont être sommées de s’engager à remplacer les moyens de l’Etat pour faire ses compétences régaliennes, voire l’une des plus importantes (avec celle de la Défense nationale et de la Justice), à chaque fois que nous monterons nos effectifs et que nous aurons des mesures de renforcement, est-ce que le gouvernement va baisser les effectifs et les moyens afférents à la sécurité des clermontoises et des clermontois ?”
C’est ça la question centrale que vous posez au fond en filigrane de votre intervention.
Moi je pense, que ce dont les gens ont besoin à Clermont-Ferrand, c’est que l’Etat assure ses missions. Et force est de constater que dans ce domaine, il ne les assure pas à la hauteur de l’attente de nos concitoyens.
Je vous remercie donc d’avoir mis le point et l’accent sur l’une des faiblesses fortes de ceux que vous soutenez au gouvernement. J’espère qu’ils me recevront. J’espère qu’ils nous donneront les moyens.
Je vais vous donner un dernier exemple de la situation. Les organisations syndicales de policiers (en France comme ici) comme la situation des mouvements des policiers en colère et la BAC (Brigade Anti-Criminalité) ont beaucoup de revendications : citons par exemple celle sur les mesures des horaires très inégalitaires entre les policiers nationaux qui travaillent le jour et ceux qui travaillent la nuit.
Tout cela a révolté une profession dont nous avons extrêmement besoin et qui a elle aussi besoin d’être soutenue et reconnue. En effet , quand les agents qui défendent la République ne sont pas reconnus pour la qualité de leur profession et quand on ne leur donne pas les moyens (comme c’est le cas actuellement), nous courons de grands risques d’une décomposition du vivre ensemble.
Je ne peux espérer qu’une chose de votre intervention Monsieur Faidy, c’est que vous ne fassiez pas comme Monsieur Brenas depuis 6 ans : une instrumentalisation bêtement inefficace des questions de sécurité, mais que vous nous aidiez au contraire (par les réseaux que vous devez connaître à la République En Marche) à avoir des moyens pour notre Police Nationale à Clermont-Ferrand.
Conformément aux engagements que nous avons pris dans cette campagne et les annonces que nous avons portées dans notre programme (et qui sont celles de toute l’équipe municipale), j’embaucherai 10 policiers municipaux.
Nous n’avons pas la capacité Monsieur Faidy de multiplier les ETP de policiers au moment où l’État enlève les siens. Et je préfère créer des postes d’ATSEM, des postes de médiateurs culturels, des postes de bibliothécaires, des postes de cantiniers ou de cantinières et aussi dans nos EHPAD plutôt que créer des postes de policiers qui relèvent aussi de la compétence de l’État.
J’espère ainsi avoir apporté évidemment toutes les réponses aux grandes interrogations qui étaient les vôtres.
Pour terminer mon intervention, je souhaiterais vous dire où nous en sommes. En 2018, nous avons géré la sécurité routière, qui était faite avant 2014 par la Police Nationale (et donc l’Etat). On m’avait demandé de reprendre cette mission avec nos policiers municipaux, dégageant ainsi des possibilités pour des agents de l’Etat d’être sur la voie publique et faire leur vrai travail de sécurité.
Nous avons :
- sensibilisé 2 300 petits clermontois par nos policiers municipaux dans les écoles
- effectué 5 155 contrôles radars avec 62 procédures
- verbalisé 750 fois pour stationnement sur emplacement handicapé
- mis en fourrière 2 902 véhicules pour stationnement gênant
- fait 8 000 heures d’îlotage, rien qu’en QPV par nos propres policiers municipaux,
- réalisé 700 procédures dont 200 en matière de santé et d’environnement, 60 pour infractions aux arrêtés municipaux (que j’ai pris depuis 2014), 130 dans le cas d’assistance aux personnes, 31 interpellations avec mise à disposition de la Police Nationale
- capturé 600 animaux errant, nous coûtant juste pour cela 150 000 €
Faire croire que nos agents ne font pas le travail et que notre ville n’est pas capable de mener une politique de sécurité républicaine, c’est mentir aux clermontois et jouer sur les peurs, ce qui n’est pas digne du débat public.
Je compte encore une fois sur vous pour m’accompagner et m’aider à convaincre nos dirigeants nationaux à faire des efforts sur la Police Nationale au sein de la ville de Clermont-Ferrand.